dimanche 8 mars 2015






                                      J'allais pieds nus
                                      



  Invitation 2                                              shg 2014




J’allais pieds nus
Marchant sur l’eau des rêves,
Avec les mots mouvants
Où s’enlise le sens,
Et l’empreinte du chemin
Qui mène nulle part.

J’allais pieds nus
Buttant sur l’air du temps,
Avec les vents soufflants
Où s’efface le sens,
Et la couleur du chemin
Qui mène nulle part.

J’allais pieds nus
Et je croyais danser.

Puis sous les pas du vent
J’ai ramassé la cendre
Des espoirs consumés
Dans ces vains voyages
Que chaque jours nous trament

J’ai peint mon visage
De cette poudre d’ombre
Née d’une flamme,
Celle-ci même qui voulait un temps
Éclairer le chemin du vivant.

J’ai peint mon corps
De ce talc de nuit,
A la blancheur impalpable,
Celui-ci même qui se voulait un temps
L’antidote des jours noirs.

J’ai peint les murs
Qui entourent ma vie
J’allais pieds nus
Et je croyais danser.
                                         








shg  
2014




 










samedi 7 mars 2015







 Si sévères et si grandes
Ces personnes qui regardent
En leur figure dressées
Comme de hautes montagnes...














"Merahi metua no tahamana" (détail)              Paul Gauguin
    




   
Ne tourne pas la tête, un miracle est derrière
Qui guette et te voudrait de lui-même altéré:
Cette douceur pourrait outre passer la Terre
Mais préfère être là, comme un rêve en arrêt.

Reste immobile, et sache attendre que ton cœur
Se détache de toi comme une lourde pierre.

                                                                     





Jules Supervielle

























jeudi 5 mars 2015









Celui qui rêve se mélange à l'air   








R. P. Danthine






Visage et les doigts en forme de pleurs
Il n'y a rien de commun entre moi et vos gerbes
Ou cette mélodie qui a la couleur
Des naissances
Alors je descends une rue de rosiers
Et je sens monter en moi un grand chagrin
Comme le sel de la mer
                                                        





Georges Schehadé 














Grégorien      






Andre Petterson

     



Des vols fixes d'oiseaux parfaits qui sont sans air
Profondément nus
Ne retombant jamais sur le sein de la terre
Mais se meurent de joie se meurent de lumière
Ces oiseaux sont des mots et sur les lèvres nés
pur ornement de la voix fraîche entre les vents
Du haut du bas et de tout l'imprévisible temps
Ils se tournent pour adorer et se demandent
S'ils sont toujours du corps ou peut-être de l'âme
A la fin et s'ils ont gravi les échelons
Qui déplacent le mot de la voix au silence
Et du silence à la terreur de l'âme


                                                                   




 Pierre Jean Jouve




















mercredi 4 mars 2015








Aux orgues de mon cœur   
                              





Reiko Fujinami






Mon cœur gît en moi lourd comme une cathédrale
palpitant, nu et froid comme ce sanctuaire
vide mais résonnant ainsi que le désert.
Ses cantiques d'amour y sont pur minéral
et le murmure est doux glissant du bréviaire.
Dans ses vapeurs d'encens flotte le pur mystère
porté sur un rai d'or de son vitrail en fleur
qui voile l'avenir de toutes ses couleurs.
Et cette flèche d'or qui traverse mon sein
cet éclair de ma nuit venu d'autres demains
s'est émoussé sans bruit contre le marbre blanc
qui cache mon amour dessous le froid gisant.
Ah! que viennent à lui les rayons de mon soir
et demeure à jamais le gisant oublié. 
                          
                                                                








Anne Dupin   
1963























mardi 3 mars 2015








Nos rêves prisonniers   

             




Mark Horst





Nos rêves prisonniers à la racine des mots
se dressent en forêt suçant en vain le ciel
tel mille bras silencieux,
perruque de branches tendues vers des nuées
à reflet d'anthracite.
 Lianes brunes figées au creuset minéral,
 gemmes d'argent, 
galets de plomb, perles de cuivre, 
cristaux d'airain ou d'antimoine
à parfum d'arsenic.
Voici nos rivages atteints, clos sur l'horizon.
Adieu dunes voyageuses où s'enlisent nos raisons.
                                                   
                                                                                         




 shg 
    février 2015































dimanche 1 mars 2015








Soyez libre, n'emportez rien  






"la folle"                      dessin encre de Chine                      shg






Chaque pas ne fait avancer la vie que d'un  pas 
dans les jeux dorés des sables mouvants
  ou bien le long des lents courants marins arrêtés, 
ou de ces vieux vents qui ont perdu leurs chemins.

Il n'y a pas d'hiver  plus terrible
dans le froid silence de la parole retenue
mais il n'y a pas d'été plus chaud
que le sein rassurant de ce sage silence.

Tout est partagé en battements infimes,
allées et venues invisibles en un mouvement Brooglien
 dans ce vacarme silencieux de naissances et de morts
dans cet immobile chant du monde.

                                                                                       



shg
 03/2015