mardi 27 décembre 2016








Heureux les vents...
 
 
 
 
 
Léonard de Vinci
 
 
 
 
Heureux les vents qui fuient vers les jardins
car les jardins ont été faits pour des rois
qui s'y étaient distraits quelques temps
avec des jeunes femmes entrelaçant des fleurs
au son prodigieux de leur rire.
 
Elles étaient l'éveil de ces parcs fatigués,
elles allaient en chuchotant
 comme le vent dans les buissons
et le froissement de soie de leurs robes matinales
faisaient sur le gravier un bruit de ruisseau.
 
 
 
 
Rainer Maria Rilke
"Le livre de la pauvreté et de la mort"
 
 
 
 
 
 

lundi 26 décembre 2016








Même si rien







Juan  Manuel  Cossio





Même si rien ne doit survivre
je saurai où trouver la pitié
pour les passants aux poings
et les dents serrées
Justiciers qui n'ont foi 
qu'en leurs dix doigts
et refusent l'indulgence
du soleil dans les rues
guère plus courtes que l'éternité
où les eaux mêmes de la mort
à marée basse ne demandent 
qu'à rester limpides




Frank Holden
"Au pas des arbres"










lundi 12 décembre 2016









Derniers gestes
 
 
 
 
 
 
Robert K. Semans
 
 
 
 
 
 
Que saisir sinon qui s'échappe,
Que voir sinon qui s'obscurcit,
Que désirer sinon qui meurt,
Sinon qui parle et se déchire?
 
Parole proche de moi
Que chercher sinon ton silence,
Quelle lueur sinon profonde
Ta conscience ensevelie,
 
Parole jetée matérielle
Sur l'origine et la nuit?
 
 
 
 
 
Yves Bonnefoy
"Poèmes"
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 








dimanche 4 décembre 2016








Pomme
 
 
 
 
 
 
Louis Treserras
 
 
 
 
 
 
Un matin planté d'arbres
au bord d'un chemin de brume
Un silence mouillé
marchant aux bras de fantômes feuillus 
Des tas fumants en bordure des prés
dans le tiède fermentation 
du jour se levant
Le pays de ma petite enfance
a une odeur de pomme.






Shg
nov 2016
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

lundi 28 novembre 2016








Pans de miroir
 
 
 
 
 
Sandra Flood
 
 
 
 
 
 
Mais les vagues de sable
ont la trempe du fer
l'incendie froid de l'ombre
a désherbé le temps
car si la coupe est miroitante
des minerais de nuit 
révélés par le fer
le poète s'enterre
à ses pans de miroirs
 
 
 
 
Jean Louis Depierris
"l'Esprit de la terre"
(extrait) 












 

jeudi 24 novembre 2016









La cloche fêlée
 
 
 
 
 
 
Shaun Downey
 
 
 
 
 
 
 
Moi, mon âme est fêlée, et lorsqu'en ses ennuis
Elle veut de ses chants peupler l'air froid des nuits
Il arrive souvent que sa voix affaiblie
 
Semble le râle épais d'un blessé qu'on oublie
au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts,
Et qui meurt, sans bouger, dans d'immenses efforts.
 
 
 
 
 
Charles Baudelaire
"Les fleurs du Mal"
"La cloche fêlée"
(extrait)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

dimanche 20 novembre 2016









Faut-il qu'on te montre?
 
 
 
 
 
 
 
Robin Eley 
 
 
 
 
 
Faut-il qu'on te montre
comment l'aurore arrive
et vient à la rencontre 
du parfum de la fleur
et du chant des oiseaux ?




Victor Hugo
" l'esprit humain"
(extrait)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

lundi 14 novembre 2016








égarée dans le ciel
(1)



Frederico Infante





J'aurais voulu vivre au temps des scribes
pour écrire d'une main anonyme
les mots de passage
qui accompagnent les morts
J'aurais voulu consteller d'univers
les barques fermées
où s'accomplit la métamorphose
des jeunes filles





Jean Monod
"Invocations"
(extrait) 






vendredi 11 novembre 2016







égarée dans le ciel
(2)





 
Frederico  Infante





J'aurais voulu posséder la langue silencieuse
entendues des âmes porteuses de clés
et j'aurais voulu vivre aussi au temps d'Orphée
pour dire les sons correspondants à de tels secrets
Et suivi des rocs, des bêtes et des arbres,
chantant, accompagner leur retour!








Jean Monod
"Invocations"
(extrait)








 









dimanche 6 novembre 2016








Rien
 
 
 
 
 
 
Rembrant            (autoportrait)
 
 
 
 
 
 
Plus rien même pas de la cendre
même pas le souvenir, plus rien
plus rien sauf cette joie de l'oubli
ce vent de l'oubli qui arrache tout
détruit tout et saccage le reste
 
...
 
Je ne ricane plus, je ne souris plus
je ne baisse plus les yeux ni ne les lève
je ne les frotte même plus, je ne dors pas
je veille comme une pierre sans ombre
et je suis transparent comme le temps
 
je vis comme vivent les nuages et la fumée
je m'efface et jusqu'au dernières traces
 
 
 
 
 
 
Philippe  Soupault
"Rien" (extrait)
 
 
 
 
 
 
 
 
 


vendredi 4 novembre 2016








L'émigrant de Landor Road







Street art à Venise                                               nov 2016  











Gonfle-toi vers la nuit Ô Mer les yeux des squales
jusqu'à l'aube ont guetté de loin avidement
des cadavres de jours rongés par les étoiles
parmi les flots et les derniers serments.





Guillaume Appolinaire
"L'émigrant de Landor Road"
(extrait) 








 







jeudi 3 novembre 2016








Ce soir




 
Street art à Venise                        nov. 2016





Ce soir mon cœur fait chanter
des anges qui se souviennent...
Une voix, presque mienne,
par trop de douleur tentée,
monte et se décide
à ne plus revenir,
tendre et intrépide,
à quoi va-t-elle s'unir?






Rainer Maria Rilke
"Vergers" (extrait)










 

jeudi 13 octobre 2016








Une femme Navajo






Adara Sanchez Anguiano






Et une femme Navajo, tissant son tapis
selon la forme de son rêve
doit à la fin rompre son dessin
pour que son âme s'échappe et lui revienne.
Mais dans l'étrange dessin,
comme l'empreinte du serpent dans le sable
l'âme laisse sa trace.






D.H. Laurence
"Sous l'étoile du Chien"
(extrait)















 

vendredi 7 octobre 2016








Je crains ça pas tellment






Le Pierrot                                           Antoine Watteau








Je crains pas ça tellment  où va la bouquinaille
les quais les cabinets la poussière l'ennui
je crains pas ça tellement moi qui tant écrivaille
et distille la mort en quelques poésies
....
Aujourd'hui bien lassé par l'heure qui s'enroule
tournant comme un bourin tout autour du cadran
permettez mille escuz à ce crâne - une boule -
de susurrer plaintif la chanson du néant



                                                                  



 Raymond Queneau