samedi 4 avril 2015








Train du retour    






Aline Jansen




Le glissement des trains sur la piste aimantée
L'écorce de la terre tourmentée, 
sa marche à rebours
Hautes et grises veillent des roches
en des blondeurs d'aiguilles sèches
Aux lèvres des vents, l'odeur amère et forte des pins
La rivière est bandée aux fûts des peupliers lointains
Les villages s'enfuient enserrant leur passé
Des visages de femme éclairent la nuit des portes
Des chansons en ruisseaux
des rires en fleurons aux foulées des enfants
Des chèvres nègres dans l'éclair d'un galop
Image fugitive à jamais gravée
Le pâtre boit l'oubli en une flaque d'ombre
que l'amandier nourrit

Ô fuite de l'espace, ô chevauchée du temps
Le soleil m'est compté et sa félicité
Adieu à l'oasis où j'ai pu m'oublier
Déjà la senteur aigre du passé
ses cornues, ses alambics
Et l'alcool enivrant des pulpes de l'été.


                                                                                 



Anne Dupin
août 1965